Le Parrain du roman punk daigne enfin nous adouber(!!!).
Avec toute la promo qu'on a fait sur Sang Futur, on peut pas dire que ce soit vraiment une fleur, mais enfin pour une fois que Sa Sublimité Barbelée sort de sa réserve (c-a-d du PMU) pour jouer les Poirot-Delpech, on va pas s'en priver.
La semaine dernière, donc, il avait lu autre chose que Paris-Turf…
NÈGRE D'UN POLITICIEN DE BAS ÉTAGE…
J’avoue m’être franchement marré en découvrant le titre de ce recueil, clin d’œil plus qu’ironique à la vieille signature publicitaire d’un marchand de mobilier à bas coût. Marignac m’a dit ensuite qu’il l’avait en tête depuis plus de vingt ans, ce titre, ce qui prouve au moins sa pugnacité. Mais pugnace, je savais déjà qu’il l’était. Dans un univers parallèle où ça n’aurait pas été le cas, on le retrouverait à l’heure actuelle avec trente kilos de panse en trop, marié, converti au judaïsme ou à l’islam et père de famille nombreuse, manager du Franprix de la place Stalingrad, ne commettant plus que de la bouillie pour bobos. Ou encore, bourgeois bordelais en perruque jaune, alcoolique mondain encarté à l’UMP, fréquentant une chapelle intégriste et nègre d’un politicien de bas étage. Pour ceux qui le connaissent un peu, imaginez le tableau ! Imaginez le gâchis…
Heureusement, notre homme a su garder son creux à l’estomac – celui qui fait mal mais permet d’écrire – son athéisme qui lui vaut d’échapper à la soumission, et ses appétits féroces de vieux gamin ricanant.
Ce bouquin au titre improbable aura au moins eu le mérite de faire découvrir une facette peu connue de son talent : celui, rare mais toujours significatif, et ici souvent excellent, de nouvelliste. Un talent bien plus exigeant que celui du romancier, car il n’autorise ni l’à peu près, ni la péroraison.
Recueil. Dans mon cerveau un chouia tordu, ce terme exhale comme un relent funéraire et muséographique, un avant-goût de Père-Lachaise aggravé d’une désagréable odeur de formol. Nostalgie souvent rance, comme une motte de beurre demi-sel ayant dépassé la date limite de vente.
Heureusement pour son auteur, Le Pays Où la Mort Est Moins Chère survit à ce type de catégorisation par sa verve ciselée au scalpel et sa noirceur implacable. Ce, même s’il n’échappe pas à la nostalgie, mais l’exhibe plutôt comme un trophée. Celle, surtout, de ces cames qui donnent parfois l’illusion d’être un surhomme – mais qui, beaucoup plus souvent, transforment l’usager en spectre pâle, Blanc-Bec rêvant de Banlieue Noire, mais à jamais prisonnier de l’esclavage gris des aiguilles et du manque. Celle, aussi, des travestis qui venaient autrefois exhiber leur derrière siliconé dans le boui-boui d’Aziz – ou des femmes sans entrailles qui représentaient ce que Karl a connu de plus proche de l’amour. Celle des bars de l’Entre Deux Mondes où viennent s’échouer d’improbables épaves sans nom – constante de l’œuvre marignacienne où l’identité se dilue dans la fonction. Chose qu’il ne faut surtout pas faire en littérature – sauf quand, comme ici, le jeu consiste précisément à ne pas suivre les règles. Et à ce titre, on peut dire que l’artiste ne s’est pas loupé. Chapeau, le marmot.