lundi 17 mars 2008

Chroniques domestiques (1): Passons au salon

À partir de bientôt, vous pourrez retrouver sur ce blog les aventures véridiques d'une jeune maison d'édition.

Et pour commencer...


... en ce moment, c'est le salon du livre de Paris. Que fait un éditeur à ce moment-là, quand il n'a pas de stand parce qu'il n'a sorti qu'un seul livre et que ça ferait cher la promo? Eh bien il brave la chaleur, la foule, les toilettes cradingues, la bouteille d'eau à trois euros, et il y va quand même.
Samedi, après déjeuner, rendez-vous avec un agent, celui, entre autres, de l'auteur brésilien Fernando Bonassi, dont Moisson rouge publiera le très noir et très beau Suburbio* en octobre prochain. Signe distinctif: il aura à la main un catalogue jaune. Drame: le plan du Salon ressemble furieusement à un catalogue jaune.
Évidemment, tout commence par un malentendu, qui n'a rien à voir avec la couleur du catalogue. L'agent a noté 13 heures, moi 14. On ne saura jamais qui a raison (moi, sûrement). Je cavale entre le stand de Viviane Hamy, où nous avions rendez-vous (à 14 heures, donc, ou bien 13) et celui d'Hatier, où, à ce qu'on m'a dit chez Viviane Hamy, l'agent a un rendez-vous.
- Euh... et il ressemble à quoi?
- Euh... grand, brun, bonne tête, dans les 35 ans.
- Euh... merci.
Bon, on finit par se retrouver et on s'installe sur une petite banquette vaguement design et surtout moyennement confortable. L'éditeur de chez Hatier (le rendez-vous de 14 heures) doit aller voir un auteur, ça tombe bien. Entre deux gorgées d'eau à trois euros, je prends des notes. On parle beaucoup de Bonassi, auteur de la filière gijonnaise, comme José Ovejero et Bernardo Fernandez. Son style particulier, circulaire, poétique, obsédant; son discours très militant. Il m'avait lancé, à table, en terrasse, devant une bouteille de rouge, "j'écris sur le Brésil qui ne danse pas", disons, celui qui danse trois jours par an et crève le reste de l'année. Il ne se présente pas comme un Brésilien "représentatif" mais d'abord comme un blanc riche (tout est relatif...) qui a fréquenté l'université et observe son pays sans complaisance — et c'est peu de le dire.
Je raconte la belle histoire de Moisson rouge à Jordi Roca, l'agent en question. Il a des idées pour nous. Des idées de livres et des idées de financement, parce que la littérature étrangère a un coût, celui de la traduction, or Moisson rouge est avant tout une maison de "world polar". Espagne, Brésil, Russie, Grèce, Mexique, États-Unis... On verra ça lundi, pendant la journée pro.
On est lundi, et je suis prête à dégainer mes cartes de visite.

En attendant, pour occuper mon insomnie, je dévore un excellent manuscrit français (il y en a) que mes acolytes ont lu et approuvé. Je sens qu'on va encore s'entendre...

*Traduit du portugais (Brésil) par Danielle Schramm.

1 commentaire:

Moisson Rouge a dit…

Autant je comprends que les éditeurs aillent au salon du livre, c'est leur boulot, mais que les "civils" s'y pressent, viennent s'y agglutiner par milliers et même payent pour cela me déconcerte au plus haut point. Je ne vois absolument pas le plaisir que peut en tirer un lecteur landa... Pour revenir à des choses plus sérieuses - les livres-, Bonassi écrit sur la classe ouvrière brésilienne et notamment, dans Suburbio, sur le quartier d'où vient Lula. C'est un roman d'une noirceur étouffante sur la solitude, la misère, l'espoir et l'illusion. Ecrit dans un style poétique, violent, parfois lyrique, Suburbio jette une lumière sombre sur le Brésil prolo, urbain, loin des flonflons du carnaval et des danseuses de Bahia.